mercredi 13 janvier 2010

Les blasphémateurs

Posted by Picasa


Jusqu'en 1261, le Conseil Majeur condamnait ceux qui avaient blasphémé contre Dieu, la Vierge Marie ou les saints à payer une amende de trois lires. S'ils ne pouvaient payer, ils étaient jetés à l'eau. Cependant, en 1270, considérant comme excessive la punition de l'eau, elle fut remplacée par celle du pilori (exposition à la risée).


Malgré tout, les Vénitiens ne s'abstinrent pas de cette mauvaise habitude. Priuli, dans ses Mémoires manuscrites (1502) rappelle que : "A Venise, il était difficile de se débarrasser de deux choses : le blasphème, en usage à tous les degrés, et les vêtements à la française, dont l'usage était trop ancré, encore que la nation fut ainsi haïe par toute l'Italie".


Plus fortes se firent alors les peines contre les blasphémateurs et on créa une magistrature adaptée, dite "Exécuteurs contre la blasphémie" . Sanuto raconte que trois individus, qui, un jour de la semaine sainte, se mirent à blasphémer dans l'auberge Bo à Rialto, furent condamnés le 5 mai 1519 à avoir la langue coupée face à la même auberge , les yeux arrachés, la main droite coupée et à être pour toujours bannis. Dans de nombreux cas, les supplices décrits étaient couronnés par le supplice extrême. Quant aux prêtres, il y avait pour eux la "cage". On les enfermaient dans une cage (cheba) , de bois, équipée de fers, accrochée à mi-hauteur du campanile de Saint Marc, où ils étaient exposés jour et nuit, aux intempéries, pour toute la vie ou pour un temps fixé, recevant leur nourriture quotidienne par l'intermédiaire d'une cordelette qui partait du bas.
La chronique de Barbo nous informe qu'un prêtre Agostino de S. Fosca fut condamné en 1542 à être enfermé dans la cage du 8 août à fin septembre
Merci à Claude Soret pour ses traductions : anecdotes historiques vénitiennes - 1897 -Giuseppe Tassini

3 commentaires:

  1. Madame,

    Je me permets de vous contacter suite à la découverte de votre blog sur Venise.
    Je suis extrêmement novice dans le domaine, mais je m'y intéresse depuis peu.
    J'ai eu l'agréable surprise de m'aperçevoir que vous étiez une passionnée et que vos connaissances dans le domaine paraissaient très étendues, aussi bien sur une dimension historique que touristique.
    Il se trouve que justement je m'y intéresse, et notamment, la Venise du XVIIIe, "la grande et la décadente" à ce que j'ai pu comprendre, pendant sa période de faste culturelle et artistique.
    Je m'intéresse justement a cette dimension artistique, les métiers qui tournaient autour de ce domaine, à quelles genre de personnes ils s'adressaient et quelles classes sociales y avaient accès.
    J'aurais également aimé obtenir des informations sur la statut des femmes à cette époque, encore une fois en corrélation avec ce monde artistique.
    J'ai tenté en vain de faire des recherches sur le sujet mais sur internet les informations sont, hélas, très réduites.
    Je me permets donc de vous laisser mon adresse mail car j'aprecierais beaucoup que vous me fassiez partager vos connaissances et qu'éventuellement vous éclairiez mon esprit sur ce vaste sujet qui parait si passionnant.
    Peut-être pourriez-vous également me conseiller des lectures ou encore des films qui illustrent la période.

    Avant de vous quitter je tiens à vous féliciter pour ce blog qui est très intéressant ainsi que pour le choix de la musique !

    Voici donc mon adresse : stephadeline@hotmail.fr, j'aimerais bcp que nous puissions échanger par mail.

    Bien Cordialement,

    Adeline.

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  2. Votre questionnement ouvre de vastes perspectives. Il existe de nombreux ouvrages qui traitent des métiers d'art à Venise, le plus souvent réunis dans des corporations, avec les fameuses "scuole" qui perdurèrent jusqu'à l'intervention de Buonaparte qui cassa cette tradition suivis par l'occupant autrichien ensuite. Pour faire bref, dans la plupart des corps de métier, les femmes pouvaient accéder à la formation professionnelle. Le recrutement se faisait dans les classes populaires pour la plupart des métiers, mais on trouve parfois des jeunes patriciens qui optaient pour une formation artistique : peintre, sculpteur, musiciens, doreur, etc...
    Un point avant de recommander quelques lectures : surtout bien garder à l'esprit que la société vénitienne, très avancée socialement et culturellement, pratiquait une mixité sociale comme cela devait être le cas dans la France d'avant la révolution. Hormis la direction politique et diplomatique qui incombait aux familles inscrites au Livre d'Or, l'accès à toutes fonctions et métiers nécessaires au bon fonctionnement de la cité, était possible à tous : il fallait être chrétien, citoyen de la Sérénissime et vierge de toute condamnation pour prétendre, en fonction de son savoir, de ses capacités et de ses connaissances, accéder à des postes qui ailleurs étaient réservés à une élite. La République de Venise était un système démocratique dans le principe, oligarchique dans le fonctionnement, voire populiste mais c'est un des rares exemples où, du Moyen-Age aux temps modernes (pratiquement pendant 1000 ans), le prince, les nobles, les soldats, les artisans, les pêcheurs et les paysans, les commerçants et les clercs partageaient un quotidien semblable ou dans l'absolu tout le monde pouvait prétendre à l'ascension sociale. Les faits (et la faiblesse des hommes)ont peu à peu contredit cette vérité fondatrice de la République de Saint Marc.
    Je vous recommande entre autres, la lecture de :
    Alvise ZORZI - Une cité, une république, un empire : Venise (Nathan)
    Philippe MONNIER - Venise au XVIIIe siècle (Ed
    Complexe)
    Philippe Braunstein (dirigé par) - Venise 1500, la puissance, la novation et la concorde : le triomphe du mythe (Autrement, Série Mémoires)
    Bien à vous.
    Lorenzo

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  3. Monsieur Lorenzo,

    Merci beaucoup de votre réponse, ainsi que pour vos conseils de lecture.
    Vous paraissez très documenté sur le sujet, et je me permets d'user de vos connaissances pour solliciter encore quelques approfondissements.
    J'aurais aimé savoir si les femmes pouvaient, à l'époque, évoluer dans le domaine du spectacle, pouvaient-elles devenir comédienne,actrice, musicienne ?
    Si oui, de quel milieu social étaient-elles issues, étaient-ce des métiers réservés à des classes favorisées ou au contraire au peuple ?
    J'imagine que ce genre de métier sous-entendait de maitriser, en plus, de la lecture, de l'écriture et du latin, la pratique d'un instrument. Chose qui n'était accessible qu'aux classes les plus favorisées.
    Les gens qui évoluaient dans le monde du spectacle étaient-ils des notables ou davantage des marginaux ?
    Pouvait-on diviser les Vénitiens en trois classes sociales, la noblesse, la bourgoisie, le clergé et le tiers-état ?
    Durant la période de faste de Venise (le XVIIIe donc) les fêtes qui étaient données étaient-elles véritablement dénuées de toute ségrégation, cela signifie-t-il que tout le monde se mélageait et se côtoyait, dans les mêmes fêtes et fréquentaient les mêmes lieux ?
    Enfin, on parle énormément de la légereté Vénitienne de cette époque, notamment, en autre, au travers des jeux qui se déroulaient dans des lieux réservés particulièrement à cet effet.
    Pourriez-vous m'en dire plus ?
    J'ai cru comprendre qu'il s'agissait de salles où les Vénitiens se réunissaient pour jouer (est-ce comparable au casino aujourd'hui, ou à une ambiance plus feutrée, tel le bridge ou le poker ?
    Quels genre de jeux étaient pratiqués ?
    Je m'interrogeais également si les Vénitiens modestes pouvaient acceder aussi facilement à ce genre de divertissement.

    En attendant d'avoir le plaisir de vous lire, je vous remercie encore une fois pour l'attention et le temps que vous m'accordez ainsi que pour vos réponses si riches.

    A très bientôt,

    Amicalement,

    Adeline.

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