lundi 28 septembre 2009

Sior Marie de Tola et les marionettes

C'était la tradition de célébrer les mariages dans la cathédrale San Pietro di Castello, le 31 janvier, jour anniversaire de la translation du corps de Saint Marc . C'est avec solennité que les épouses y portaient, dans des petits coffres, leur trousseau nuptial.
Au Xème siècle, quelques pirates venus d'Istrie ou de Trieste envahirent l'église au milieu des célébrations et ravirent les épouses avec leurs dots, les embarquant dans des navires qu'ils avaient préparés sur la rive et prenant précipitamment la fuite.
Les vénitiens, s'étant réveillés de leur première surprise, poursuivirent les kidnappeurs, le jour de la purification de la Vierge.
Pour commémorer cet épisode, il fut décidé que le doge, accompagné de la dogaresse, devrait visiter l'église Santa Maria Formosa, en grande solennité ; elle est justement dédiée à la Purification. En outre, il fut institué la célèbre fête des Maries, au cours de laquelle douze jeunes filles, appelées Marie, richement vêtues, ornées d'or et de bijoux, dans des barques bien décorées, au milieu de musiques harmonieuses, parcouraient les canaux de toute la ville pendant les huit jours qui précèdent la Purification. Ce jour-là, avec le doge et sa suite, elles se rendaient à l'église S. Pietro di Castello, écoutaient la messe, puis se dirigeaient ensuite à l'église San Marco où elles recevaient les cierges bénis. Pour finir elles allaient visiter Santa Maria Formosa.
Cette fête cessa en 1379, époque à laquelle les Vénitiens durent penser à autre chose, la guerre de Chioggia battant son plein.
C'est le moment de noter que les Maries ne furent pas toujours en chair et en os mais furent remplacées à partir d'une certaine époque par douze figures de bois. Le peuple ne vit pas d'un bon œil un tel changement et il n'était pas rare de jeter derrière ces pantins des trognons de chou et d'autres immondices. En outre, quand un vénitien voulait tourner en ridicule quelque femme niaise, maigre, il prenait l'habitude de la surnommer : "Marie de bois" (en italien: "Maria de legno" ou "Maria de tola")*, appellation encore vivante de nos jours
Quelques uns attribuent la même origine au mot "marionnette". Dans son histoire des marionnettes , Ferrigini raconte que les figurines de bois ci-dessus mentionnées étaient aussi appelées "marione" parce que plus grandes qu'au naturel. Dans la semaine des Marione, les marchands de jouets vénitiens mettaient en vente des modèles réduits de celles-ci. Ils les vendaient à grand prix et parce qu'elles étaient une réduction des Marione , on les appelaient des marionnettes

* siora = signora (vénitien) et tola = legno (vénitien)
Note : mot marionnette dérive certainement de Marie
Selon l'encyclopédie du spectacle (Rome 1960), il dérive bien du vénitien "Marie de tola"
Selon le dictionnaire étymologique italien (Battisti et Alessio, Florence 1952) ,le mot marionnette viendrait du français marionnette, de Marion, diminutif de Marie
Ceci en ce qui concerne le mot, car l'art d'articuler des pantins tenus par des fils était en usage déjà chez les grecs et les romains.

MERCI A CLAUDE SORET QUI M'A PERMIS DE RETRANSCRIRE CES ANECDOTES VENITIENNES

1 commentaire:

  1. Merci, Maïté, pour cette publication passionnante. J'ignorais tous ces détails et, comme j'aime beaucoup les marionnettes, je suis ravie d'en apprendre plus sur leur histoire.
    Anne

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