mardi 8 décembre 2009

La pierre du campo San'Angelo


En 1745, le fameux Giacomo Casanova, qui alors jouait du violon dans les théâtres vénitiens, et quelques-uns de ses compagnons s'adonnaient à la vie la plus débauchée du monde. Ivres, ils faisaient le tour de la ville, fréquentant les bordels, refusant de payer. Ils détachaient les gondoles de la rive pour qu'elles errent à travers les canaux. Ils réveillaient prêtres, médecins et entremetteuses pour qu'ils accourent là où l'on n'avait pas besoin d'eux. Ils arrachaient les sonnettes des portes. Ils entraient dans les campaniles pour faire sonner les cloches et parfois coupaient les cordes de celles-ci, si bien que le sacristain ne pouvait plus à l'aube sonner l'Ave Maria.
Casanova lui même rapporte ces faits dans ses Mémoires, où il ajoute : "Durant une nuit très sombre, il nous vient en tête de renverser une grande table de marbre, espèce de monument placé au milieu du campo de S. Angelo. On disait qu'à l'époque de la ligue de Cambrai, les commissaires payaient sur cette table les recrues qui prenaient service pour Saint-Marc et cela lui valait une sorte de vénération".
Quelques uns, qui pensent inexact ou romanesque ce qu'écrit Casanova, mettent en doute l'existence de cette pierre, mais sont contredits par la Chronique Vénitienne Sacrée et Profane (édition de 1736), où après la description de l'église de S. Angelo, on lit : "Il y avait sur la place une pierre où se payaient les milices au temps de la peste". Que ce soit à l'époque de la ligue de Cambrai ou au temps de la peste, la pierre existait donc bien. Si dans les éditions postérieures (par exemple, celle de 1793), on ne mentionne plus la pierre, c'est que plus tard, elle fut enlevée de l'endroit où elle se trouvait.

Merci à Claude Soret pour ses traductions : anecdotes historiques vénitiennes - Giuseppe Tassini

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